Doctorant.e projet - ANR ENUMINE au laboratoire CEMTI (H/F)

Le projet doctoral s'attachera en particulier au suivi des mesures de protection des jeunes de 12 à 18 ans dans l'environnement numérique et leur perception par les jeunes eux-mêmes. Les plateformes numériques permettent aux mineurs d'accéder à certains de leurs droits fondamentaux, leurs droits culturels, leur liberté d'expression. Une lecture combinée de la législation permet d'identifier des droits, des dispositifs et des procédures spécifiques aux mineurs : le droit d'effacement, le droit de ne pas être profilé à des fins publicitaires, le droit de bénéficier “d'un niveau élevé de protection de la vie privée, de sûreté et de sécurité des mineurs”. De nombreuses recherches ont étudié les violences numériques et les difficultés des jeunes pour y faire face [5, 80, 44]. Plusieurs rapports montrent les difficultés des parents [83] ainsi que les risques encourus par les mineurs, notamment pour leur santé mentale [26, 37, 39]. Les résultats de notre projet Adoprivacy [71] auprès de 190 adolescents entre 12 et 18 ans, ont confirmé que les mineurs sont très préoccupés par la protection de leur vie privée sur les plateformes en ligne et déploient pour la préserver des stratégies très diverses, dont l'obfuscation et le signalement. Ils connaissent en revanche mal les droits des usagers des plateformes numériques en-dehors du droit à l'image, et rarement leurs droits spécifiques en tant que mineurs. Ils manifestent un réel désir de comprendre le fonctionnement de la modération et du signalement sur les plateformes, mais se montrent généralement pessimistes quant aux possibilités d'y faire valoir leurs droits. Les adolescents ont pourtant une intuition de ces notions de droit, fondée notamment sur leur questionnement éthique et leur jugement moral. Ils sont très inquiets des risques de violences numériques, qu'il s'agisse de violences à la personne ou d'intrusions sur leurs outils numériques [63]. S'ils pensent maîtriser leurs pratiques de géolocalisation [8], ils sont inquiets de l'utilisation par leurs parents de dispositifs de surveillance et de géolocalisation. Il nous parait donc essentiel d'explorer leur perception des droits et d'évaluer comment elle impacte leur comportement, leurs usages numériques, leur connaissance des recours (techniques, juridiques, ou sociaux) possibles.
Le projet doctoral approfondira, dans la continuité de la recherche Adoprivacy, la connaissance de l'utilisation par les adolescents des fonctionnalités qui permettent la mise en œuvre de leurs droits numériques, promues par les entreprises (réseaux sociaux numériques, GAFAM, plateformes de jeu), en tant qu'elles seraient une manière concrète de réaliser une modalité de leur autonomisation numérique. Les hypothèses du projet Enumine sont les suivantes (i) les adolescents sont capables de se représenter l'interdépendance des responsabilités individuelles et des plateformes; (ii) la réaction de ces dernières lors des signalements joue un rôle essentiel dans la compréhension de la mise en œuvre des droits par les adolescents; (iii) mais le fonctionnement des plateformes suscite des contournements chez les adolescents (déclaration d'âge); iv) la connaissance des fonctionnalités proposées par les plateformes pour protéger les droits des mineurs est très inégale selon les milieux sociaux et le genre; v) les plateformes répondent à leurs obligations de protection des mineurs (RSE) par la démultiplication des outils de surveillance numérique destinés aux parents qui posent de nouveaux risques tant par rapport à l'autonomisation des adolescents (du fait du risque d'atteinte à l'intimité des mineurs) que par rapport au creusement des inégalités sociales dans les formes de médiation parentale (du fait de leur complexité).
Le projet doctoral « Régulation des plateformes, qu'en pensent les jeunes utilisateurs ? Enquête sur la perception, l'intuition et la mise en œuvre des droits des jeunes sur les plateformes numériques auprès des adolescents de 12 à 18 ans » s'appropriera certaines de ces hypothèses et pourra les reformuler afin notamment de les actualiser. Il emploiera des méthodologies sociologiques, sémiologiques et d'analyse de contenu et de design des interfaces.
Le cadre théorique sera interdisciplinaire, principalement basé en sociologie des usages et sciences de l'information et de la communication, mais devra articuler des données sur le droit de la régulation des plateformes, et la socio-économie des plateformes numériques, ainsi que des travaux en psychologie cognitive.
Le ou la doctorante sera amenée à prendre en charge une partie du travail de coordination avec les deux autres équipes du projet, celle de Tanja Petelin, Cecoji, et celle de Valérie Inès de la Ville, Cerege et à participer aux séminaires et rapports de synthèse qui seront réalisés dans le cadre du projet ANR.
Des missions seront organisées à Poitiers ou Angoulème, mais aussi sur les différents terrains de la recherche, sur le territoire national.
Activités Recherches scientifiques dans le cadre du projet ENUMINE
Revue de la littérature scientifique
Entretiens, focus groups, ateliers avec des adolescent.e.s de 12 à 18 ans
Analyse des données qualitatives
Présentations des recherches dans des séminaires et des colloques
Rédaction des articles scientifiques
Rédaction d'une thèse en sciences de l'information et de la communication
Contribution aux sites web partenaires
Liens internes et externes En lien avec les deux autres équipes porteures du projet, celle de Tanja Petelin (Cecojii) et celle de Valérie Inès de la Ville (Cerege)